Comment se construisent les textes que nous écrivons pour nos recherches et les expérimentations artistiques que nous déployons ? Quelles sont les idées que ces objets portent – pour nous ou malgré nous ? Dans nos démarches de recherche, de création, de « recherche-création », nous extériorisons la pensée, nous matérialisons des intuitions, nous tentons des choses, qui peuvent ainsi être partageable aux autres.
Pour cette dernière session, nous observerons différentes façons de déplier la pensée. En (re)traçant des cheminements, en mettant en scène nos raisonnements, nous questionnerons nos méthodologies de travail. La « méthodologie », c’est le « chemin » justement qui permet d’arriver à une forme, une idée, un argument. À partir d’une série d’exercices qui mettent en scène le déroulement d’une pensée, qui, autrement dit, nous permettent de tracer un chemin, nous réfléchirons collectivement à la façon dont nous pouvons partager des idées aux autres.
Que cherchons-nous à comprendre et à dire ? Notre terrain d’expérimentation en art complexifie encore cela en donnant toute sa place au tâtonnement, à l’intuition sensible, à la singularité d’une expérience, à une approche par éclairage successifs, à l’importance de porter des questions plutôt que des réponses ; un terrain où il est même tout à fait entendu que nous soyons dépassé·es par les formes que nous proposons pourtant, et qu’il ne s’agit pas de les réduire à un discours théorique. Pourtant, nos démarches ne sont pas non plus dénuées d’un rapport au monde situé et cherchent à investir des problématiques. En prenant la responsabilité de nos méthodologies de travail, et de nos modes d’argumentation (ce que nous exprimons, comment nous formons des arguments, pour qui et pourquoi), nous travaillons à construire et partager ensemble de la pensée.
On peut bien décrire des objets de recherche (session 1. « décrire, c’est déjà analyser ») en prenant conscience de tous les biais qui animent notre perception des choses ; on peut bien sûr rapprocher des objets de recherche les uns des autres pour créer du sens (session 2. « monter, c’est déjà prendre parti) ; mais comment formaliser une intuition ou une idée sous la forme d’un texte théorique ou d’une œuvre ? Quels sont nos outils pour avancer des arguments ? Qu’est-ce qui rend convaincante (ou percutante, éclairante) une recherche, une création, une « recherche-création » ? Une création peut-elle rendre plus convaincante une recherche ? Les exigences de la recherche académique en terme d’hypothèses et de preuves, peuvent-elles aussi s’éprouver dans la création artistique ? Comment une œuvre peut-elle faire argument ? Peut-on penser une œuvre comme une démonstration ?
Pour ce master, vous présentez à la fois une proposition artistique, et un mémoire de recherche (dans lequel figureront une introduction, un développement et une conclusion). Si les formes peuvent énormément varier, la démarche cherche à rendre compte d’un parcours que vous nous offrez après avoir lu, écrit, expérimenté, tenté des choses, décrit et analysé des objets, après avoir rapproché des éléments. Que voulez-vous dire et qu’est-ce que ces objets (mémoire et création) diront (une fois détachés de vous) ?
Ces questions seront investies par des mises en scène de votre méthode, autrement dit, par le parcours d’un chemin que vous pourrez présenter aux autres. Pour cela, il s’agira de formuler une hypothèse (sérieuse ou absurde), comme une pioche qu’on lance au loin, et qu’il s’agira de rejoindre en déposant sur le chemin des objets, des documents, des expérimentations, qui, agissant comme des preuves, vous permettront de formuler une série d’arguments.

Secrétariat : Ambre, Bettina
Images : Noam, Sullivan
Paroles : Hortense, Vasco
Référent·es : Etienne

SESSION 3. ARGUMENT